Critiques ciné et autres.
1 Novembre 2017
Roman Polanski adapte le roman D’après une histoire vraie de Delphine de Vigan et met en scène Emmanuelle Seigner dans un nouveau huis clos regroupant les thèmes fétiches du cinéaste. Malheureusement, ce film, trop prévisible, s’avère être une coquille vide.
Delphine est l’auteur d’un roman intime et consacré à sa mère devenu best-seller. Déjà éreintée par les sollicitations multiples et fragilisée par le souvenir, Delphine est bientôt tourmentée par des lettres anonymes l'accusant d'avoir livré sa famille en pâture au public. La romancière est en panne, tétanisée à l'idée de devoir se remettre à écrire. Son chemin croise alors celui de Elle. La jeune femme est séduisante, intelligente, intuitive. Elle comprend Delphine mieux que personne. Delphine s'attache à Elle, se confie, s'abandonne. Alors qu’Elle s’installe à demeure chez la romancière, leur amitié prend une tournure inquiétante. Est-elle venue combler un vide ou lui voler sa vie ?
Mais qu’arrive-t-il à Roman Polanski ? Son projet de film sur l’affaire Dreyfus sans cesse reporté, il signe une nouvelle adaptation d’une œuvre littéraire à succès. Jusque-là, mis à part Oliver Twist, (mal)venu après son chef-d’œuvre Le Pianiste, trois magistrales adaptations en quatre ans (The Ghost Writer, Carnage, La Vénus à la fourrure) prouvaient le talent du cinéaste pour s’approprier une œuvre et en faire sa propre matière, tournant toujours autour des mêmes obsessions. Enfermement, paranoïa, usurpation d’identité, cruauté et lâcheté humaines, rapports de domination, folie, tous les thèmes étaient là et pourtant D’après une histoire vraie n’échappe pas au naufrage.
Coécrit avec Olivier Assayas, le film est censé reposer sur une ambivalence, un suspense – Polanski qualifie son film de « thriller psychologique » tout de même. Problème de taille, après les cinq premières minutes, tout mystère est éventé et l’on a compris absolument tous les enjeux de l’entreprise. Les 95 minutes restantes font tomber le film de Charybde en Scylla malgré l’immense talent d’Emmanuelle Seigner (qui fait ce qu’elle peut avec ce qu’on lui donne) : Eva Green semble jouer une parodie de son rôle, le supposé mystère est lisible jusqu’au ridicule, le scénario étire inlassablement une question à laquelle la réponse a été donnée dès les premières images. Un ratage complet pour un immense cinéaste qui avait pourtant ici matière à renouveler son travail, fidèle à ses obsessions. Le temps de Répulsion, sur le même thème de la paranoïa, semble loin.