Critiques ciné et autres.
9 Novembre 2017
Deux ans après son Prix du Jury cannois pour The Lobster, Yorgos Lanthimos repartait en mai 2017 avec le Prix du scénario pour son quatrième long-métrage, Mise à mort du cerf sacré. La brillante mise en scène très « kubrickienne » et un humour à froid ne suffisent totalement pas à compenser un film étrangement dérythmé.
Steven, brillant chirurgien, est marié à Anna, ophtalmologue respectée. Ils vivent heureux avec leurs deux enfants Kim, 14 ans et Bob, 12 ans. Depuis quelques temps, Steven a pris sous son aile Martin, un jeune garçon qui a perdu son père. Mais ce dernier s’immisce progressivement au sein de la famille et devient de plus en plus menaçant, jusqu’à conduire Steven à un impensable sacrifice.
Récompensé à Cannes d’un Prix du scénario (alors que l’on aurait plutôt vu la mise en scène) partagé avec A Beautiful Day de Lynne Ramsay, cette Mise à mort du cerf sacré nous plonge dans le quotidien d’un couple bourgeois (il est chirurgien cardio, elle est ophtalmo) avec deux beaux enfants et une belle maison. Tout semble parfait, mais un grain de sable va venir enrayer la machine. Yorgos Lanthimos joue les Haneke, ou même les Ruben Östlund (Palme d’or cette même année avec The Square), avec son regard clinique sur la bourgeoisie mais apporte, comme dans The Lobster, une touche fantastique.
Les premières séquences sont assez stupéfiantes, notamment un long travelling arrière inspiré de Kubrick (la référence évidente du cinéaste qui filme le corps de Nicole Kidman comme le maître dans Eyes Wide Shut) ou un échange étrange entre le chirurgien et un ado (le prometteur Barry Keoghan, vu aussi dans Dunkerque), une relation que le réalisateur met du temps à expliciter. Lanthimos a un indéniable talent de mise en scène – un peu poseur parfois tout de même – mais bute sur un scénario étrangement agencé, les « révélations » arrivant à des moments non pas inattendus mais plutôt inopportuns. L’aspect tragédie grecque est réussi avant de tourner (un peu) au grotesque en fin de parcours. Après Alps et The Lobster, Yorgos Lanthimos bute encore une fois sur un scénario bancal. A quand le grand film qui fera exploser son immense talent de metteur en scène ?