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Un cinéphile dans la ville.

Critiques ciné et autres.

"Au coeur du mensonge", un film de Claude Chabrol


Sorti le 13 janvier 1999, Au cœur du mensonge est un polar de Claude Chabrol, pure tradition. Avec une nouvelle équipe de comédiens, mise à part Sandrine Bonnaire qu'il a déjà dirigée dans La cérémonie, il signe le deuxième volet, après L'enfer (lire l'article du 31 août 2008) et avant Merci pour le chocolat, d'une trilogie que l'on pourrait appeler "l'enfer du doute".

 


 

Des enfants découvrent le corps d'Eloïse, dix ans. Elle a été violée et étranglée. Dans un petit port de Bretagne, la commissaire Frédérique Lesage, récemment promue, soupçonne René, professeur de dessin, dernière personne à avoir vu Eloïse. René et sa femme, Viviane, infirmière à domicile, sont bien acceptés dans le village, mais ce ne sont pas des natifs. Germain-Roland Desmot, écrivain à succès surmédiatisé, est la star du pays. Viviane soutient son mari mais n'est pas insensible à la cour que lui fait le personnage médiatique. Le doute s'insinue dans l'esprit de Viviane... Quelle vérité surgira des mensonges des uns et des autres?

 


 

Au-delà d'une intrigue policière et comme son titre l'indique, ce film traite du mensonge. Dans cette 51ème réalisation, Claude Chabrol filme des personnes qui mentent, toutes. Tout le monde ment à tout le monde, mais, pire, chacun se ment à soi-même. "Quand tout le monde ment, il n'y a plus de mensonge" déclare le cinéaste. En 1998, Chabrol aborde aussi des sujets de société comme la pédophilie ou le recours au Viagra et autres. Dans la France de Jacques Chirac ("Je mets souvent la photo du Président quelque part dans mes films, comme ça on situe" dit chabrol), plutôt en berne, ce sont des couleurs ternes et des brumes qui caractérisent l'humeur générale. René (Jacques Gamblin) est un peintre. Les couleurs sont donc un paramètre fondamental pour ce film. Des décors aux vêtements, rien n'est laissé au hasard. Chabrol effectue un travail considérable sur le cadre et l'image. Si la commissaire porte des cols roulés aux coloris flashy, elle les recouvre invariablement d'un manteau marron ; elle est un personnage ambigu, fragile en apparence mais redoutable et "une vraie garce", selon son créateur. Si Chabrol a choisi Valeria Bruni Tedeschi pour ce rôle, c'est parce qu'il a cherché, dit-il le 11 janvier 1999 sur Canal + dans Le Cercle, "l'actrice la plus improbable pour jouer un flic". Quant à Viviane (Sandrine Bonnaire), elle porte du rouge, du gris, du noir au départ puis du bleu, sur les conseils de l'écrivain (Antoine de Caunes), qui a une certaine influence sur elle.

 

René crée des trompe-l'œil pour le théâtre municipal comme dans sa cuisine. Chabrol avoue que son film est construit comme une succession de trompe-l'œil qui sont révélés aussitôt pour les invalider et en présenter un nouveau. Le spectateur est ainsi "baladé" pendant 1h45, avec un dénouement vraiment inattendu. Le mensonge intéresse particulièrement Claude Chabrol. "C'est en province que le mensonge est le plus intéressant. Dans les grandes villes, on ment, mais il s'agit souvent de mythomanie, ce qui ne m'intéresse pas. Dans les petites villes de province, les relations sont beaucoup plus serrées. Et l'on parle beaucoup, on ment pour protéger les apparences" déclarait-il le 8 janvier 1999 à Bernard Pivot sur le plateau de l'émission Bouillon de culture. L'enjeu d'Au cœur du mensonge est aussi de voir pourquoi chacun ment, que ou qui protège-t-il...

 

Au cœur du mensonge est un polar, un film de société et aussi un vrai film de cinéma, très codé et techniquement irréprochable. Mais c'est également une chronique du couple ; des thèmes comme la jalousie, l'adultère, la compassion, le doute, l'usure sont traités ça et là. La distribution est brillante : Sandrine Bonnaire, Jacques Gamblin, Valeria Bruni Tedeschi et Antoine de Caunes dans les premiers rôles, Bulle Ogier, Bernard Verley, Pierre Martot dans les seconds. Adrienne Pauly, déjà vue dans Mauvais genre aux côtés de Jacques Gamblin en 1997 ou dans Terminale en 1998, faisait ses débuts au cinéma avant le succès de son album en 2006. Elle fait partie de la distribution du prochain Chabrol, Bellamy, avec Gérard Depardieu et -encore- Jacques Gamblin, sur les écrans le 25 février 2009.

 

 

...HB...

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