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Un cinéphile dans la ville.

Critiques ciné et autres.

"Intimité", un film de Patrice Chéreau


Alors que Persécution (lire l'article du 31 décembre 2009) peine à trouver le grand public -environ 120 000 entrées depuis sa sortie il y a six semaines-, je voudrais revenir sur un des plus grands films de Patrice Chéreau, Intimité, sorti en mars 2001.

 

 

Affiche-Intimite.jpg


 

Jay et Claire se retrouvent chaque mercredi dans le sous-sol d'une petite maison londonienne pour y faire l'amour. Dans cette relation passionnée, toute idée de sentiment et d'attachement est bannie. Les deux amants ne savent rien de leur vie respective jusqu'au jour où Jay va vouloir en savoir plus sur sa maîtresse.


 

Intimité est le premier (et seul à ce jour) film de Patrice Chéreau tourné en Angleterre, à Londres plus précisément. Adapté du roman de l'écrivain anglo-pakistanais Hanif Kureishi, Intimacy pour son titre original est entièrement dialogué en anglais. Dans le roman, Jay s'interroge sur son couple et sur ce qui le pousse à rester ou partir ; dans le film, Jay a quitté femme et enfants (que l'on découvre lors de flashbacks pas toujours utiles) et vit seul dans une maison aussi peu entretenue que son résident est paumé. Dès la première scène, Chéreau plante le décor en filmant les rapports sexuels crus (non simulés) entre Jay et Claire qui baisent (c'est le mot) en silence tous les mercredis. Le sexe est leur seul langage, celui des corps, imparfaits mais pourtant beaux car sans fard. Les acteurs Mark Raylance et Kerry Fox (récompensée au Festival de Berlin) sont remarquables dans leur engagement, leur jeu, leur sincérité.

 

Jay travaille le soir dans un bar depuis des années. Son rythme est à l'image de sa vie, décalé. Il dort tard, voit peu de gens mis à part Claire le mercredi, Ian son jeune collègue français gay (épatant Philippe Calvario) et son ami Victor, lui aussi divorcé, tout aussi paumé et qui vit mal sa solitude. Ian (étrange, ce prénom anglais pour un français…) est le confident, ou plutôt le "vide-ordures" des turpitudes et états d'âme de Jay ; il va devenir le spectateur de l'histoire entre Jay et Claire. La première partie du film est centrée sur Jay, qui peu à peu va s'intéresser à la vie de Claire car il s'attache à elle malgré lui et veut en savoir plus. La filature dans Londres, qui finit par s'inverser, est une des plus belles scènes du film.

 

Intimité interroge sur de nombreuses formes de relations humaines, mais aussi sur des choix de vie, des personnes cabossées par la vie, comme Betty (impériale Marianne Faithfull), élève de Claire (elle donne des cours de théâtre et joue le soir dans le sous-sol d'un bar) et confidente malgré elle de Claire, comme un miroir de la relation entre Jay et son collègue Ian. Claire est donc actrice le soir, elle rame, donne des cours en banlieue et passe des auditions qui ne donnent rien. C'est en la suivant, alors qu'elle sort du sous-sol de la maison où ils ont baisé, que Jay découvre qu'elle joue dans des pièces au sous-sol (encore, comme sa vie était liée à cette notion d'incomplétude) d'un pub. Jay va y découvrir la vie de Claire, y rencontrer son mari et son fils. Début d'une situation qui pourrait être vaudevillesque mais Chéreau a l'intelligence de s'en servir autrement.

 

A l'image du "ni avec toi, ni sans toi" de La femme d'à côté de Truffaut, Patrice Chéreau propose des possibilités d'avenir pour Claire et Jay, mais laisse leur situation légèrement floue, comme dans une impasse. Un des plus intenses films de Chéreau.




...HB...
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