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Un cinéphile dans la ville.

Critiques ciné et autres.

"Les hauts de Hurlevent", un film de Andrea Arnold

 

Andrea Arnold donne sa version des Hauts de Hurlevent, le roman culte d'Emily Brontë. Avec une réalisation âpre et des acteurs inconnus, elle offre un nouveau regard sur ce classique.

 

 

Affiche-Les-hauts-de-Hurlevent.jpg


 

Angleterre – XIXème siècle. Heathcliff, un enfant vagabond, est recueilli par M. Earnshaw qui vit seul avec ses deux enfants, Hindley et Cathy, dans une ferme isolée. Heathcliff est bientôt confronté aux violences de Hindley, jaloux de l’attention de son père pour cet étranger. Le jeune garçon devient le protégé de Cathy. A la mort de M. Earnshaw, Cathy est courtisée par le fils de riches voisins, laissant peu à peu Heathcliff à la merci de Hindley. A l’annonce du prochain mariage de Cathy, Heathcliff s’enfuit. L’attachement fraternel qu’il vouait à Cathy se transforme alors en un amour obsessionnel.

 

 

 

 


 

L'unique roman d'Emily Brontë, publié en 1847 sous le pseudo masculin d'Ellis Bell, a connu de nombreuses adaptations par des réalisateurs de tous horizons tels que Albert Victor Bramble (1920), Luis Bunuel (1954), Jacques Rivette (1986), Peter Kosminsky (19962, avec Juliette Binoche)… Andrea Arnold est la onzième à adapter le chef-d'œuvre. Pourquoi revenir sur ce roman sur lequel tout semblait avoir été dit et filmé ? La réalisatrice, détentrice de deux Prix du jury cannois (Red Road en 2006 et Fish Tank en 2009) déclare : "Nous avons tous été trompés par les versions mélodramatiques qui font de Wuthering Heights une histoire d’amour romanesque et fantastique, alors qu’en réalité, c’est une sombre histoire d’obsession et de désespoir au destin tragique".

 

Andrea Arnold choisit un format 4/3 sans doute pour enfermer les personnages dans un destin tragique que l'on connaît. La lande anglaise, elle la filme plein de boue et de vent. D'ailleurs la nature joue un rôle à part entière ici. "La nature peut être belle et rassurante, mais également brutale, égoïste, furieuse et destructrice. (…) Heathcliff est une force de la nature. Nous le sommes tous. C'est pour cela que la nature devait être présente dans toutes les trames de l'histoire" ajoute la cinéaste. La caméra à l'épaule suit Heathcliff et Catherine dans tous les recoins de la lande, dans la boue, dans la pluie et le vent. Le chef opérateur Robbie Ryan a su s'adapter aux mouvements des corps sans donner un effet trop saccadé, mais juste l'urgence du désespoir. Entre plans très serrés et grands espaces, le film navigue dans les "collines aux vents houleux", traduction la plus acceptable du titre original Wuthering Heights. L'autre choix radical du film est l'absence de musique. De ce fait, le son, fondamental, est oppressant par son réalisme : "je voulais qu'on entende tout : les animaux, le vent, les coups, les claques, les coups de fouet, les gémissements, les cris, les pleurs, la souffrance" signale Andrea Arnold.

 

Le film oublie la seconde partie du roman et se concentre pendant un peu plus de heures sur la relation entre l'orphelin Heathcliff et sa sœur adoptive Cathy. Avec peu de dialogues et des ellipses narratives, Andrea Arnold livre une version âpre et anti-mélodramatique de l'histoire. Aucun personnage n'est entièrement victime ou bourreau. Heathcliff est ici non pas un gitan, comme dans le livre, mais un noir, remarquablement incarné par le jeune Solomon Glave. La cinéaste ajoute la question raciale, si épineuse au XIXème où les noirs étaient considérés comme des sauvages, au drame social. Cette version des Hauts de Hurlevent s'avère être la plus sombre, mais aussi la plus émouvante et la plus belle jamais filmée.  

 

 

...HB...

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