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Un cinéphile dans la ville.

Critiques ciné et autres.

"Xenia", un film de Panos H. Koutras

 

Présenté dans la sélection Un Certain Regard à Cannes 2014, Xenia est le quatrième long-métrage de Panos H. Koutras et la sensation grecque de l'été. Le passage à l'âge adulte drôle et émouvant de deux frères dans un pays rongé par la crise.

 

 

Affiche-Xenia.jpg


 

A la mort de leur mère, Dany et son frère Odysseas, 16 et 18 ans, prennent la route d’Athènes à Thessalonique pour retrouver leur père, un Grec qu’ils n’ont jamais connu. Albanais par leur mère, ils sont étrangers dans leur propre pays et veulent que ce père les reconnaisse pour obtenir la nationalité grecque. Dany et Ody se sont aussi promis de participer à un populaire concours de chant qui pourrait rendre leur vie meilleure. Ce voyage mettra à l’épreuve la force de leurs liens, leur part d’enfance et leur amour des chansons italiennes.

 

 

 

 


 

Révélé en 2001 par l'OFNI L'attaque de la moussaka géante, Panos H. Koutras avait livré le troublant Strella en 2009. Xenia est le fruit d'une réflexion du cinéaste sur la jeunesse, avec un fond autobiographique, mais aussi sur l'état actuel de son pays. Même s'il n'est pas une œuvre politique, le film est parcouru par la crise qui dévaste la Grèce : montée de l'extrême-droite (et de l'homophobie, xénophobie, etc…), jeunesse en manque de repères, chômage, précarité, faillites… Dans ce contexte, deux jeunes frères bien différents sont dans une situation complexe due au droit du sang qui fait loi en Grèce. Né à Athènes d'une mère albanaise et d'un père grec qui ne les a jamais reconnus, les deux garçons n'ont pas la nationalité grecque et ont grandi en Albanie, avec leur mère, décédée désormais. Ils comptent bien retrouver leur géniteur pour obtenir un passeport européen et une compensation financière. Les deux frères sont incarnés par deux jeunes acteurs non-professionnels époustouflants, Kostas Nikouli et Nikos Gelia.

 

Panos H. Koutras choisit, après des films dans le genre "auteur", un traitement beaucoup plus coloré et pop, à l'image du héros, Dany, épatant de naturel et de souffrances rentrées derrière une attitude masculine et ultra gay. Son frère, Odysseas (quel prénom !), est aussi réservé que Dany est excentrique, mais tous deux partagent la fêlure d'une mère aimante mais alcoolique et d'un père qu'ils n'ont pas connu. La mère, figure omniprésente malgré son absence, vouait un culte à Patty Pravo, une chanteuse italienne des années 60, entre Dalida et Patricia Carli, qui fait un caméo dans le film, et Dany convainc son frère Ody, chanteur surdoué, de passer l'audition pour un télécrochet (la Nouvelle Star version grecque). Le film est l'épreuve du temps pour ces deux garçons qui vont devoir devenir adultes. Dany ne se sépare pas de son lapin blanc (ce qui nous réserve un twist assez stupéfiant et très poétique) et a toujours une sucette à la bouche. Les images sont un peu lourdingues mais le film se sort habilement de quelques ornières formelles et scénaristiques. Xenia signifie "hospitalité" mais le cinéaste ajoute : "le sens de ce concept ancien est beaucoup plus complexe. C’est une loi respectée par les dieux grecs, qui nous intime d’honorer et d’accueillir les étrangers d’où qu’ils viennent." Car la xénophobie, qui vient de la même racine, est très présente dans une Europe en proie aux relents fascisants. Xenia, c'est aussi un hôtel abandonné, havre de paix dans lequel squattent les deux frères et imaginent un avenir meilleur. Peu importe qu'ils retrouvent le père ou non, ils sont au-delà de ça, dans une "nouvelle odyssée" comme le souligne l'affiche de manière humoristique. Ce film nous donne une grande bouffée d'espoir et rappelle que le goût des autres ne s'accommode pas avec la haine promue par l'extrême-droite. Même quand on le sait, il est toujours bon de le redire.

 

 

...HB...

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